Marches européennes contre le chômage, la précarité et les exclusions Marie-Paule Connan NOS conclusions du Sommet de Barcelone : Réversible ! et plus encore !
Point presse à l'issue du Sommet de Barcelone : Aznar, flanqué de Prodi et de Solana tire ses conclusions : « le processus des réformes économiques et sociales est IRRÉVERSIBLE».
Seulement voilà, à Barcelone, l'histoire a marché dans les deux sens. Dans le bunker des chefs d'Etat et de gouvernement, la Machine infernale de l'utopie libérale de l'exploitation sans limites a fonctionné à plein régime. Dehors, les rues étaient envahies par un autre mouvement, inverse, porté par plus de 400 000 manifestants qui chantaient l'espoir et la volonté de vivre une autre histoire. A vrai dire, il fallait y être - ou attendre le retour des délégué(e)s, des copines et des copains pour connaître ce qui s'est passé là-bas au contre sommet. Silence TV, silence radio. Rien ou si peu. Comme si ce n'était pas un fabuleux événement de participation à la construction européenne, pour une autre Europe, démocratique et sociale, « contre l'Europe du capital ». Merci à Indymedia [1] d'exister. C'était le seul point auquel se connecter pour avoir des nouvelles de ceux et celles qui - pour vouloir exprimer leur citoyenneté européenne - se sont fait arrêter, contrôler et refouler par les polices françaises et espagnoles. « L'Europe proche des citoyens » disaient les Chefs d'Etat et de gouvernement. Lorsque les citoyens sont à la porte, on leur tire dessus et on les refoule à coups d'auto-pompe et de gaz lacrymogène. Réagissons encore et encore, par tous les moyens, à Séville, à Florence, à Bruxelles et ailleurs pour éviter l'achèvement du dumping généralisé. Ces Chefs d'Etat et de gouvernement se comportent comme des rapaces. Ils déchiquètent tout ce qui reste des systèmes de protection sociale avant l'ouverture des portes de « l'Europe unie » aux pays de l'Est. NON, nous ne pouvons pas accepter que les décisions prises à Barcelone soient « IRRÉVERSIBLES », car dès lors, |
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La conditionnalité des prestations de chômage serait « IRRÉVERSIBLE » jusqu'où ? Jusqu'à la suppression des droits à prestations comme déjà opéré dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ? Jusqu'à l'aide en nature et l'extension du caritatif ? Quelle sera la poursuite des engagements des Chefs d'Etat et de gouvernement que l'on peut lire dans le §32 des conclusions du Sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 ? En ce qui concerne les politiques actuelles en matière d'emploi, il faudrait entre autres,
Le degré de productivité comme règle de salaire serait « IRRÉVERSIBLE » jusqu'où ? Jusqu'aux contrats individualisés, aux cadences infernales, au retour de la « paye à la pièce » ? Quelle sera la poursuite des engagements des Chefs d'Etat et de gouvernement que l'on peut lire dans le &32 des conclusions du Sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 ?
L'allongement de la durée de cotisations pour le droit à la retraite serait « IRRÉVERSIBLE » jusqu'où ? Jusqu'à l'extrême fatigue ? Comment va-t-on calculer le montant des pensions des travailleuses et travailleurs âgé(e)s à qui l'on va imposer à la fois un mi-temps et la valeur de 5 années supplémentaires de cotisations ? 10 ans de plus de boulot stressant, voilà qui pourrait réduire sérieusement l'espérance de vie et les problèmes comptables des gestionnaires des pensions ! Quelle sera la poursuite des engagements des Chefs d'Etat et de gouvernement que l'on peut lire dans le &32 des conclusions du Sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 ?
L'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité serait « IRRÉVERSIBLE » jusqu'où ? Jusqu'à 100% ? (prochaines mesures en 2003). Et la privatisation de ce qui reste comme services publics ? A quand ? Quelle sera la poursuite des engagements des Chefs d'Etat et de gouvernement que l'on peut lire dans le &37 des conclusions du Sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 ? Dans le domaine de l'énergie, le Conseil européen
Irréversible, la mise au pas des syndicats ?»Le Conseil européen engage les partenaires sociaux à mettre leurs stratégies aux différents niveaux territoriaux (européen, national, régional et local) et sectoriels au service de la Stratégie et des objectifs de Lisbonne. Pour ce faire, il les invite à présenter, à l'occasion du Sommet social, un rapport annuel sur leurs contributions. [2] Le programme pluriannuel qu'ils présenteront en décembre 2002 devrait déjà comporter cette contribution, en particulier en ce qui concerne la capacité d'adaptation des entreprises dans des domaines tels que la négociation collective, la modération salariale, l'amélioration de la productivité, la formation permanente, les nouvelles technologies et l'organisation flexible du travail.« §29 des conclusions du Sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 Les 100 000 militants présents à Barcelone pour exprimer la revendication d'une Europe plus sociale au nom des 60 millions de syndiqués, ont été caricaturés par Berlusconi comme « une bande de fêtards qui ne pensent qu'à visiter les capitales européennes et suivre à la trace, de Sommet en Sommet les gouvernants ». Les dirigeants des syndicats européens se voient offrir leur part de gâteau. Ils auront l'honneur de rédiger un devoir annuel d'application des Grandes Orientations de Politiques Economiques en partenariat avec le Patronat ! Après la somme de pertes de droits « acquis » consignées dans ce Sommet, on s'attend à ce que la Confédération Européenne des Syndicats réagisse à ce camouflet. Retour au dico pour « réversible », cette fois : [Se dit des biens qui en certain cas doivent retourner au propriétaire qui en a disposé.]. Les libéraux, si attachés à la propriété ne semblent pas encore avoir compris le sentiment de « propriété sociale » des droits acquis par la lutte, et la rage qui peut s'exprimer à leur perte. Les quelques images filtrées et les commentaires sibyllins à propos de la manifestation l'ont présentée comme une gigantesque « pride » « d'antimondialistes » insouciants. Hé oui ! On peut être heureuses et heureux d'être si nombreux, laisser éclater la musique et la danse, l'humour, l'amour et la poésie, le désir de vivre mieux tout en partageant les richesses avec le reste du monde, tout en étant déterminé(e)s à ne pas se laisser mener par le jeu de concurrence perverse imposé par la logique d'une unification seulement monétaire et marchand. De Marche européenne en Marche européenne, de Contre sommet en Contre sommet, on se parle, on se connaît et se reconnaît. On fait l'Europe et on refait le monde. On redéfinit la marche de l'histoire. Messieurs Aznar et Compagnie, sachez que rien n'est irréversible. Nous continuerons à lutter pour que tout soit REVERSIBLE, et plus encore ! La Constitution européenne qui se prépare doit garantir les libertés, les droits civils, politiques et sociaux pour chacune et chacun, pour toutes et tous. Nous serons de plus en plus nombreux à l'exiger. Qui sème la misère, récolte la colère |
[2] Les conclusions du Sommet de Barcelone sont sur le site : http://europa.eu.int/index_fr.htm
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