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UN TRAITÉ CONSTITUTIONNEL EUROPÉEN MISOGYNE QUI FAIT TABLE RASE DES CONQUÊTES FÉMININES

Sonia Mitralias (membre de la coordination grecque de la Marche mondiale des femmes et du Forum social grec)

Il est indéniable que sous la pression des mouvements féministes et de leurs luttes, la protection des droits de femmes a pu être inscrite dans de nombreux traités internationaux et européens. Les avancées significatives – mais toujours insuffisantes – obtenues ces dernières décennies, sont remises maintenant en question ou, pire, sont effacées par le très néolibéral traité constitutionnel abusivement présenté comme une « Constitution » européenne.

Ce n’est donc pas un hasard si ce traité s’attaque frontalement au plus fondamental de ces droits, à l’égalité des hommes et des femmes, qui n’est pas inclue à ses « valeur s » mais seulement à ses « objectifs ». La différence est de taille: au-delà de la valeur hautement symbolique de cette « omission », il y a des conséquences pratiques qui équivalent à un refus catégorique de mettre en place les moyens (législatifs, administratifs, culturels) en vue de réaliser cette égalité dans tous les domaines de la vie sociale (emploi, travail, revenus, etc.).

S’agit-il d’une simple omission ou d’un acte pleinement conscient des inspirateurs de ce traité? Étant donné que nombre d’associations féminines avaient demandé en vain l’inclusion du principe de l’égalité entre hommes et femmes aux « valeurs » du traité constitutionnel et que le très officiel « groupe de travail sur l’Europe sociale » a fait de même au début 2004, il est clair que les membres de la Convention européenne ont pris la décision de dévaluer ou même d’effacer sciemment et intentionnellement ce principe.

Ce refus du traité constitutionnel de promouvoir en pratique l’égalité entre hommes et femmes entre pourtant en contradiction avec les dispositions d’une série de conventions et de traités internationaux et communautaires, et équivaut à un retour en arrière de plusieurs décennies de la condition féminine. Inutile de dire qu’après l’introduction de ce traité constitutionnel, les inégalités toujours scandaleuses entre hommes et femmes auront tendance non seulement à perdurer mais aussi à empirer puisque:

  • le traité va primer sur les Constitutions nationales et sur les traités communautaires antécédents qui prévoyaient des mesures pratiques en faveur des femmes;
  • le traité constitutionnel ne s’engage en rien en faveur de telles actions et mesures concrètes.

En conclusion, même si le traité constitutionnel incorpore finalement la Charte des droits fondamentaux de Nice, l’égalité entre hommes et femmes restera un « objectif » vague et inopérant de l’UE car ce texte se montre très timide et reste en deçà des acquis communautaires quand il s’agit de promouvoir des actions positives en faveur de ce droit élémentaire. Le mépris des conventionnels pour les femmes se manifeste aussi quand il s’agit d’affronter le fléau de la violence masculine qu’elles subissent quotidiennement tout simplement parce qu’elles sont… femmes. Ce n’est pas alors un hasard si le traité constitutionnel n’inclut pas parmi les « objectifs » de l’UE la prévention et la lutte contre la violence subite par les femmes. Il s’agit ici d’un nouveau grave retour en arrière car nombre de directives des organes de l’Union citaient explicitement « la violence physique, sexuelle et psychologique » contre les femmes, la considérant même comme une forme de discrimination subit uniquement parce que les femmes sont femmes.

Ce « oubli » devient encore plus grave du fait que le droit de l’Union ne pose la question de la violence que dans le cadre de ses dispositions concernant « le trafic des êtres humains » , ignorant par contre toute autre manifestation de violence.

D’ailleurs, bien que le « trafic des êtres humains » (qui pourtant reste absent de ses « objectifs ») soit cité par l’article 17 du traité constitutionnel parmi les crimes qui devraient être combattus grâce à l’harmonisation des droits pénaux, cet article ne dit mot de la violence contre les femmes, du racisme ou de la xénophobie! De tels « oublis » sont trop éloquents pour ne pas trahir la volonté des inspirateurs néolibéraux du traité de lancer des attaques en règle contre les droits et les libertés durement acquis de la majorité des citoyens européens. Ce très, très misogyne traité constitutionnel célèbre l’union sacrée du néolibéralisme et du patriarcat…

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